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Pour la cinquième année consécutive, Interface a décidé de prendre part à un projet hors de nos frontières. C'est à Abou Korkas - près d'Al Minieh - en Egypte, qu'elle se rend cette fois pour rénover une école.



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a. L'éducation en Haute Egypte

Malgré de réels efforts de la part du gouvernement égyptien ces dernières années en matière d’éducation et notamment en matière d’équipement et d’infrastructures, de réels défis sont à relever.

Voici le constat des problèmes structurels du secteur éducatif égyptien que nous dresse notre correspondant sur place, dont il faut avoir conscience.

Il dénombre ainsi une liste de 5 difficultés notoires :

Un surchargement des classes : l’augmentation croissante du nombre d’élèves demandant l’inscription scolaire (de l’ordre d’un million par an) entraine un déficit d’infrastructures qui pousse à la surpopulation. Celle-ci est génératrice d’usure plus rapide des établissements. L’école d’Abou Korkas en est un excellent exemple.

La dichotomie public/privé entraine des inégalités d’enseignement très fortes. Ainsi l’AHEED vise à réduire cet égard en assistant et rénovant les établissements gouvernementaux. Le projet d’aide au développement s’inscrit dans cette perspective en rénovant une école publique privée de fonds publics pour son entretien.

Immobilisme politique : les plans stratégiques du Ministère de l’Éducation se succèdent au gré des personnalités qui occupent le poste mais n’aboutissent pas jusqu’ici.

Crise économique et chômage des jeunes sont des problèmes structurels : à dominante rurale, l’Égypte des campagnes tend à assurer la reproduction de la précarité des jeunes travaillant dans le secteur. L’éducation des enfants apparaît comme une perte de force de travail. Le taux d’analphabétisation est en conséquence de l’ordre de 40%.

  Le manque de conscience professionnelle et l'honnêteté académique : Il leur semble que ce point soit la source de tous les problèmes, non pas seulement au niveau de l'enseignement scolaire mais aussi dans tous les domaines de la vie active en Egypte, mais limitons nous à la question de l'enseignement. La place de l'enseignant, le maître, dans la littérature arabe est très élevé, il est considéré comme un prophète qu'on lui doit le respect et la dignité. Mais beaucoup d'enseignants égyptiens, surtout dans les écoles publiques, sont devenus des fonctionnaires, leur but n'est plus une mission à transmettre mais seulement un devoir à remplir n'importe comment, violence, indifférence, apathie, lassitude, voilà les valeurs que beaucoup d'entre eux transmettent aux enfants qui seront les hommes de demain. Quant aux enseignants des écoles privées, la plupart sont achetés par leurs élèves car ceux-là les payent très chers : quelles valeurs alors pourront-ils leur transmettre ? Pourtant, l'image n'est pas si sombre, il y a certainement des bons exemples parmi les enseignants, mais malheureusement ils sont timides et leurs effets n'améliorent pas beaucoup la situation.

b. Notre association partenaire: l'AHEED

L'Association de la Haute Egypte pour l'Education et le Développement est une organisation non-gouvernementale (ONG) d'utilité publique, enregistrée au Ministère des Affaires Sociales (actuellement Ministère de la Solidarité Sociale) sous le No. 1010 de l'année 1967. En juin 2009 l'AHEED a été déclarée, par le Ministère des Affaires Sociales, une Association Centrale pouvant travailler dans toutes zones de l'Egypte.

L’AHEED a été fondée en 1940 par le Père Jésuite Henry Ayrout, sociologue égyptien. Il écrivit sa thèse de doctorat « Les Paysans » (El Falahoun), sur la vie du paysan égyptien. Elle est considérée comme livre précieux de référence sur la vie dans les villages égyptiens en ce temps. Il y avait conclus que le point de départ du développement de la Haute Egypte était à travers l'éducation. En conséquence, l'AHEED a fondé près de 120 écoles en Haute Egypte, certaines étaient composées d'une seule classe et d'autres étaient des écoles primaires complètes. Durant les années 50, lorsque la loi organisant l'éducation fut sortie mettant de nouvelles normes pour les écoles primaires, 40 écoles seulement y répondaient. L'AHEED gère toujours 35 écoles.

Depuis sa fondation, l'AHEED a maintenu une mission ininterrompue de développement des communautés désavantagées en Haute-Egypte. Ceci est réalisé à travers la participation des communautés servies dans le but de leur permettre d'élargir leurs perspectives et d'améliorer leur qualité de vie aux gouvernorats de Minia, Assiout, Sohag et Louxor/Qena.

L'AHEED s'est rendue compte de la forte corrélation qui se trouve entre le progrès du développement (comme illustré aux indicateurs économiques, sociaux et sanitaires), l'éducation et le système d'apprentissage. Plus une personne reçoit d'éducation et de formation, meilleure sera sa vie aussi bien sur le plan économique et social que sur le plan sanitaire et environnemental.

 

Leur mission :

Nous sommes une organisation non gouvernementale, travaillant en Haute-Egypte pour aider les communautés locales à mieux se prendre en charge. Nous ciblons les plus pauvres des pauvres dans des programmes de formation et de développement destinés aux enfants, femmes et jeunes. Nos relations avec nos partenaires locales sont fondées sur les principes du respect et du dialogue.

Objectifs de l'AHEED :

1-    Donner du pouvoir aux plus démunis de la Haute-Egypte, en leur offrant des outils qui les aident à changer leur situation économique, par la formation, l’apprentissage et la participation active, qui s’appuient sur le respect de l’homme.

2-    Dynamiser le rôle des différents groupes avec qui nous travaillons. Afin qu’ils participent pleinement à la construction de leur communauté.

3-    Créer un réseau avec tous les secteurs et groupes de la société, et promouvoir les valeurs qui construisent une société, et les mettre en pratique.

4-    Encourager les communautés locales à développer leurs capacités par l’éducation et le développement.

 


Pour plus de renseignement sur cette association, visitez leur site internet :

 www.amishaute-egypte.fr/AHEED




c. La rénovation de l'école Abou Korkas, Miniah

L'AHEED possède et dirige une école formelle primaire à Abou Korkas. Elle accueille 674 élèves, 333 filles et 341 garçons (2008-2009). Le nombre d'élèves par classe est en moyenne de 40 élèves, 12 classes de primaire et 4 classes pour le jardin d'enfant. 37 professeurs travaillent à l'école, dont deux seulement sont Musulmans pour enseigner l'arabe (Il est de tradition que seuls les Musulmans enseignent l’Arabe qui est la langue du Coran).

L'école a été construite dans les années 80, plusieurs campagnes d’entretien ont été menées depuis ; mais certains secteurs de l’école ont besoin d'être fortement rénovés. Voici les besoins actuels: tuyaux d'évacuations externes, sanitaires, étanchements et enduits, peinture de 37 salles réparties sur 3 étages, carrelages au sol, etc. Le bonne réalisation de ces travaux nécessite la pleine collaboration avec des entrepreneurs professionnels locaux.

Un tel projet peut être pleinement qualifié d’humanitaire ; il permet de maintenir les enfants à l’école en évitant sa dégradation. Ceux-ci, après les travaux de rénovation voire d’embellissement, bénéficieront de conditions scolaires quotidiennes plus supportables et de moyens pédagogiques adaptés.

Souvent dans l’obligation d’arrêter l’école dès le cycle primaire, les jeunes en situation précaire ont un très faible niveau scolaire et sont parfois même analphabètes.

Les espaces nouvellement créés comme l’espace santé ou le centre d’activités parascolaires ne sont pas seulement prioritairement destinés aux enfants scolarisés.

Ce travail de restauration de l’école dispose d’une valeur ajoutée : une fois que l’école sera pleinement équipée et restaurée, les locaux seront en libre accès pour les habitants du quartier. L’intérêt d’une centre de santé ou d’une bibliothèque réside aussi dans le fait qu’ils resteront  accessibles pour la population vivant dans le quartier autour de l’école et qui ne sont autres que la famille proche de ces enfants. Les investissements faits permettront de former ou de poursuivre l’éducation de la population de ce quartier

 

 
d. A l'école d'Abou Korkas

Arrivés à 13 au Caire dans la nuit du vendredi 28 au 29 Mai, nous nous installons temporairement à l'hôtel de la capitale de l'AHEED. Le Président de l'association nous accueille, ainsi que Wahed, qui devait être notre correspondant francophone sur place, les anglophones étant eux-mêmes assez rares dans les campagnes trop éloignées. Ce dernier ne nous accompagnera finalement pas pour la totalité du séjour pour des raisons personnelles.
Le Dimanche nous partons du Caire en train et ce, jusqu'à El-Miniah, la grande ville la plus proche d'Abou Korkas, depuis laquelle nous nous rendons au village en bus, escortés militairement.
La zone étant en effet supposée "dangereuse", nous sommes régulièrement accompagnés d'un ou deux gardes durant notre travail à l'école. Dès l'après-midi, check up général de l'état des salles. Si le bâtiment semble parfaitement tenir à l'extérieur (malgré de nombreux travaux de façade et sanitaires à effectuer au dehors par les ouvriers), l'intérieur des classes va progressivement nous surprendre, et dans le mauvais sens du terme.
Si aux premiers abords le travail semble facile - nettoyer, dégager, gratter, déclouter, poncer, enduire puis peindre - il va savérer plus difficile de déterminer l'étendue des dégâts. En effet, plus le travail avance, plus l'état des plafonds des salles du haut nous surprend en plein travail: éboulements, infiltrations fragilisant les fondations, travail à recommencer constamment à zéro, ...
Nous devrons même cimenter les plafonds sur des pans entiers. Ainsi la salle Une prendra une semaine à être réalisée par quatre membres tournants de notre équipe, les autres se relayant dans les diverses salles à rénover. En sachant que nous n'avons que deux semaines à passer sur place (le vol en avion ainsi que le trajet Le Caire - Abou Korkas nous prenant une partie de ce temps précieux), nous commençoncs à nous inquiéter quant à l'avancement des travaux. D'autant que les salles "du bas" se révèlent tout aussi friables, mais sur la partie antérieure des murs cette fois, nous obligeant la plupart du temps à recimenter des murs entiers, ce qui prend finalement plus de temps que d'en élever, et ce qui est évidemment moins précis dans les finitions.

Sans Ibrahim, notre Grand ami local, rien n'aurait pu être effectué, et nous l'en remercions encore aujourd'hui.
Ce professeur d'anglais était là pour aider, tout simplement.
Un bénévole comme nous, qui a donné son temps - donc son argent - pour aider une école pour laquelle il ne travaillait même pas, qui se levait tous matins pour nous soutenir dans notre travail, au lieu de s'occuper de ses élevages (être professeur dans une campagne de Haute Egypte ne suffit pas, il faut aussi avoir un autre travail, souvent celui de fermier)

La salle "zéro" (rebaptisée à juste titre "salle de l'enfer") quant à elle arrivera également au mauvais moment, une fois la salle Une terminée. Cette dernière sera surpassée quant au travail à fournir pour la rendre vivable. Redoublant d'efforts et ayant acquis certaines techniques en une semaine, nous parvenons cependant à la finir en moins d'une semaine, en parallèle du travail fourni dans les autres salles.
Les ouvriers eux travaillent sur la réalisation de nouveaux sanitaires avec de nouveaux systèmes d'évacuation et s'occupent de refondre entièrement l'entrée de l'école qui tombait en ruine et qui la rendait presqu'inaccessible.: nouvelle porte d'accès, carrelage uniformisé, murs refondus, etc.

Un autre problème va dès le début se confronter à nous, qui sera résolu par les parents d'élèves, les professeurs et les élèves eux-mêmes: le choix d'égayer les salles de classe et d'en faire des réels lieux de vie et d'échange.
Le directeur ne nous laisse au début pas le choix: les couleurs seront sobres, les murs seront blancs, etc.
L'école étant vide en cette période de grandes vacances, nous n'avons d'autre choix que de nous soumettre aux directives.

Il va en fait s'avérer plus tard que les élèves, les professeurs, les villageois en général, n'avaient absolument aucune connaissance du projet que nous étions en train de réaliser. Ce qui était peut-être dérangeant au départ va soudain prendre sens: si les villageois, lorsque nous nous rendions à l'école tous les matins, nous regardaient avec tant de mépris et, avouons-le, une certaine forme de racisme, ce n'était pas dû uniquement au fait qu'ils n'avaient pas vu de "blancs" pendant une trentaine d'année, c'était aussi parce qu'ils ne savaient pas ce que nous faisions là et voyaient sans doute en nous de simples touristes occidentaux prenant effet de la "misère locale" pour "voir du pays".

Dès que le village a appris, grâce au bouche-à-oreille, ce qui se passait à l'école, les visages changèrent du tout au tout, les bonjours fusèrent et les sourires se dessinèrent, enfin.
Les enfants vinrent aussi nous rejoindre et prendre part au projet, parfois simplement en faisant l'effort de parler deux ou trois mots d'anglais avec nous, parfois en nous donnant des cadeaux très précieux (croix de Jésus -nous étions dans une école copte catholique-, icônes, portes-clés, petits bijoux, bonbons, etc.) et une fois même en dansant pour nous une chorégraphie que leur professeur de musique leur avait apprise.
Le thé nous étaient apportés à toute heure de la journée ou par les ouvriers ou par les parents d'élèves, nous étions dorénavant invités chez l'habitant régulièrement et partagions des moments vraiment exceptionnels avec les locaux.

Plus que de rénover une école, qui finalement on l'a compris n'était pas inhabitable, nous avons réalisé que nous apportions bien plus et qu'eux-mêmes surpassaient cet apport.
Nous leur apportions la preuve que les occidentaux sont capables de produire quelque chose de leurs mains, ce qu'ils ne semblaient pas croire au début, spécialement concernant les femmes. Nous avons vu les regards d'enfants stupéfaits qui découvraient un autre aspect de l' "Occident", différent de qu'ils pouvaient trouver dans les livres, mais nous avons aussi vu le même regard dans les yeux de leurs parents.
Eux nous ont apportés une chose bien plus précieuse: la reconnaissance mais aussi l'importance accordée aux relations plus qu'à la situation.
La pitié ne nous a jamais vraiment imprégnée en arrivant dans ce petit village. Non, ces personnes étaient heureuses, tout simplement, puisqu'elles avaient bien plus que nous: sans tomber dans les clichés, la joie des bonheurs simples. Il faut le vivre pour comprendre une telle expression, qui peut paraître triviale mais qui a fait ses preuves auprès de l'équipe d'Interface.

Finalement, nous avons terminé 27 salles.

"No matter if I don't get paid. I would have found something much more better (sic!) : Friends".

Ibrahim, quatre jours seulement après nous avoir rencontrés...
 

"Il n'existe pas d'autre voie vers la solidarité humaine que la recherche et le respect de la dignité individuelle"

 

Pierre Lecomte du Noüy





Ci-dessous, deux diaporamas vous permettront d'avoir une vue d'ensemble de notre travail mais aussi du lieu où nous étions et des personnes que nous avons rencontrées. Enjoy!


 

 




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